Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
L'éveil
17 décembre 2010

Carte de voeux

Hier, j'ai trouvé une carte dans ma boite au lettre.

C'était une carte très simple au dos de laquelle, il y avait écrit au stylo:

SL382000

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

retraité

repar

volet-roulant

petit travaux électrique.

(numéro de téléphone)

 

J'ai gardé cette carte un moment dans ma main. J'ai compris qu'il s'agissait d'une personne sans doute assez âgée pour être retraitée et assez simple pour avoir utilisé de vieilles cartes d'invitations qui n'avaient jamais servie.

Je suis montée dans l'ascenseur et je regardais cette carte dans ma main.

Une émotion immense m'a envahie. Je me suis mise à pleurer.

J'ai pleuré parce que j'ai pensé à mes grands-parents disparus qui auraient pu écrire cette carte.

J'ai pleuré sur le fait que dans notre société, on ne permet pas aux personnes âgées, ayant travaillé toute leur vie, de finir cette dernière avec dignité. La misère les attend eux aussi au tournant de l'âge.

Ils se trouvent alors obligés de mettre de vieilles cartes d'invitation manuscrites dans les boîtes aux lettres pour essayer de gagner un peu d'argent.

Un ami me faisait remarquer dernièrement que les « vieux » en occident étaient moins beaux qu'ailleurs. C'est un jugement dur mais il peut se comprendre.

Cet ami vient d'ailleurs. Chez lui, les vieux sont respectés. Il ne viendrait à l'idée de personne d'envoyer la mère ou le père dans une maison de « retraite » comme si ils ne servaient plus à rien ni à personne. Chez lui, la canicule est normale l'été. Elle ne fait pas de morts.

 

Les « vieux » d'occident sont moins beaux car ils sont mal aimés. Ils sont aigris de se sentir un poids dans une société où le jeunisme et la performance semble être des valeurs essentielles. On peut les voir errer dans les rues, parlant tous seuls à force de l'être, avec des chiens en guise de famille, le visage fermé, pâle, froissé comme un papier qui attend d'être jeté.

Ils semblent fragile car plus rien ne les retient. Et pourtant, ils sont toujours là. Le regard vidé par un petit écran qui leur tient compagnie.

Tout cela m'a assailli.

Mais j'ai pleuré aussi car en trouvant cette carte, j'ai vu aussi la force de l'être qui ne se résigne pas, qui continue à espérer, à chercher avec ce qu'il peut, ce qu'il a. J'ai trouvé cela merveilleux cette carte manuscrite avec des fautes, à côté des liasses de publicités imprimées, sophistiquées qui remplissent chaque jour les boîtes aux lettres de mon immeuble. Cette personne ne se laisse pas abattre. Elle agit. Elle ne fait pas la charité. Elle propose un échange.

Je ressentais une immense compassion, respect et amour mêlé, pour celui qui partage cette condition humaine avec moi. 

A la veille des fêtes (orgiaques) de fin d'année, cette carte a été pour moi comme une invitation à aimer ceux qui luttent, ceux qui souffrent, ceux qui dorment dans le froid de nos rues inhospitalières. A ceux qui, par faute d'avoir vieilli, sont mis au ban de la société. A ceux qui regardent les autres vivre. A ceux qui parlent tout seul à Noël et tous les autres jours de l'année.

A ceux qui aurait droit à un minimum de dignité: un toit, un peu de nourriture, de quoi se chauffer, un sourire.

Alors je me suis demandé si je n'avais pas un volet déroulant à faire réparer...

Publicité
Publicité
Commentaires
N
Merci
L'éveil
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Newsletter
L'éveil
Publicité