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L'éveil
12 février 2011

Marcher ensemble

 


 

Imaginons, un instant, juste un instant que la vie soit une randonnée en haute-montagne.

Imaginons les dangers, la beauté et le vertige.

Imaginons aussi que nous ne soyons pas seuls sur le sentier qui conduit au sommet (où vers une contrée plus hospitalière...). Nous cheminons en compagnie de nos liens, de tous ces gens que nous croisons sur le chemin, ceux que nous ne faisons que croiser. Ceux qui deviennent des compagnons de routes, nos proches, nos amis, notre entourage quotidien.

Certains ont déjà cheminé longtemps et connaissent bien les dangers, les bons et les mauvais sentiers, les moyens de survie, les lieux qui méritent qu'on s'y attardent.

D'autres ne font que commencer, trébuchent, se sont blessé et sont resté un long moment bloqués sans pouvoir avancer.

Certains sont des guides, des âmes secourables, pourvoyeurs de courage, d'amour, et de savoir. D'autres nous freinent, nous mettent en danger, ou nous font croire qu'ils savent tout alors qu'ils ne savent rien ce qui peut être fatal en haute-montagne...être mal guidé, mal accompagné.

Il y a aussi notre propre contribution dans ce cheminement, cette grande randonnée. Que pouvons-nous apporter à nos compagnons de voyage?

Devons-nous penser de manière égoïste, penser que ce chemin ne regarde que nous? Que chacun doit faire ce qui lui plait? L'égo est très mauvais conseiller dans un milieu hostile car nous avons besoin des autres. Que cela nous plaise ou non. Si nous glissons sur le chemin, il nous faut une main pour nous retenir.

Le voyage n'est-il pas plus agréable quand il est fait dans la joie, le partage, et l'écoute. Nous attendons beaucoup des autres mais que pouvons-nous offrir?

Parfois il suffit d'être présent, attentif et fidèle. Un bon compagnon de route. On ne nous demande pas de porter les autres sur notre dos...ce serait fatal pour l'autre comme pour soi. La meilleure façon de tomber d'épuisement.

Cheminer en toute sécurité en haute-montagne, en s'entourant de bonnes personnes et en veillant les uns sur les autres est le meilleur moyen d'apprécier le paysage grandiose, l'ineffable beauté de la vie. Cette splendeur qui nous échappe quand on se blesse, quand on glisse ou quand on se perd.

Il faut rendre grâce à ceux qui ont tracé le chemin pour nous, ceux qui ont cheminé en éclaireurs et nous ont ouvert la voie.

Et le conflit? Quelle est la meilleure façon de le gérer en milieu hostile? Il est évident quand on regarde la relation à travers cette métaphore du chemin de montagne que laisser libre cours à nos bas instincts, à l'agressivité est autant fatal pour l'autre que pour soi. La colère, le ressentiment, la haine réduit considérablement notre point de vue. En fait il se réduit à l'objet de ces sentiments. Et du coup, on oublie d'être vigilant. On oublie la beauté du chemin. On oublie le danger qu'il y a à oublier...et on tombe.

Une certaine littérature psycho-spirituelle nous exhorte à être vrai, à dire ce que l'on ressent lors des conflits, à toujours exprimer son ressenti sans tabou. Mais je crois que c'est un piège parce que nous ne sommes pas maîtres de nos ressentis et de nos pensées. Dire ce que l'on sent peut être extrêmement blessants pour l'autre. Et blesser l'autre c'est fermer toute possibilité de dialogue.

Mais alors comment être vrai?

Être vrai signifie d'abord et avant tout être vrai avec soi, ne pas se mentir, ne pas être dupe des manipulations de notre égo. Être vrai est un travail ardu sur soi et ne s'obtient pas du jour au lendemain. C'est pourquoi la véritable amitié est une chose rare. Peu de personne parviennent à se remettre assez en question pour construire une relation sur la vérité et l'amour (l'un ne va pas sans l'autre). Beaucoup tombent amoureux mais peu sont de véritables amis. Dès qu'on sent le petit serpent de l'ego remuer au fond de soi, on rencontre les limites de l'amitié. Et là commence le défi.

Être vrai avec l'autre devient une conséquence naturelle du travail sur soi, de la vigilance de soi, et doit se faire sans effort, ou du moins dans l'élan du coeur.

Le véritable dialogue se fait dans l'écoute AVANT les réclamations. Aujourd'hui l'écoute est une denrée rare. Observez-vous, voyez comme il est facile d'interpréter les paroles, actes, convictions des autres. Observez comme il est facile de « penser pour l'autre » simplement par le biais d'un mot, d'un geste mal compris. L'humain juge avec une telle dextérité, une telle aisance, qu'il se repait lui-même de cette capacité maladive à faire de l'autre un objet. Aujourd'hui l'écoute est rémunérée. Les thérapeutes en tout genre nous promettent monts et merveilles. Certains s'improvisent comme d'éminent « guides de montagne » et savez-vous pourquoi? Parce qu'ils ont découvert simplement le pouvoir de l'écoute.

Un être qu'on écoute se déploie comme une fleur. Il se sent pour un instant pleinement entouré par l'autre. Un être qu'on écoute se sent aimé. C'est comme ces petits escargots sortent de leur coquille seulement quand ils ne sentent plus de danger. Ce danger à exposer les parties les plus intimes de son être. Ce danger réel de laisser en pâture ce qu'il a de plus précieux à ceux qui excellent à juger – voir à ce sujet la parabole du Christ:« Ne donnez pas les choses saintes aux chiens, et ne jetez pas vos perles devant les pourceaux, de peur qu’ils ne les foulent aux pieds, ne se retournent et ne vous déchirent », Matthieu 7/6. Dans l'écoute l'être révèle toute sa beauté.

La métaphore du chemin en haute montagne peut vraiment nous aider à comprendre qu'elle est la bonne attitude à adopter avec nos compagnons de route et nous aider à réaliser beaucoup d'erreurs dans nos relations.

Nous devons être attentifs les uns envers les autres, même avec les membres de notre famille qui sont un pain béni pour évoluer (c'est souvent à partie d'erreurs et de souffrances que nous grandissons). Fuyez les gens qui cherchent (parfois de façon subtile) à vous séparer, vous diviser de vos proches car un être isolé en haute-montagne est toujours une proie facile pour les prédateurs...Et cela vaut aussi à grande échelle, quand on cherche à isoler une communauté du reste du monde, à la rendre importune car "différente". Or chaque être est différent, unique et chaque vie est comme ces mandalas de sables qu'une fois terminés on efface. Condamner la différence, c'est condamner tout ce qui existe à par soi. C'est le paroxysme de l'ego. 

Fuyez les gens qui vous mettent en danger ou vous détournent du paysage sublime de la vie car ce sont des égarés qui ne souhaitent partager que leur...égarement. Ceux qui veulent avancer sont reconnaissables par leur humilité.

Ne tombez pas dans l'erreur de croire que, parce que vous êtes dans une voie spirituelle, d'amour inconditionnel, vous devez sacrifier votre vie à des personnes qui ne le feraient certainement pas pour vous. Le sacrifice est vain. Le sacrifice est un mensonge.

Le don est une vérité. Car le don amène toujours au partage.

Il n'y pas à culpabiliser de bien préparer son voyage, de choisir les bons compagnons de route (compagnon signifiant "partager le pain"), de mettre toutes les chances de votre côté pour préserver le bon déroulement de ce cheminement car des imprévus nous attendent toujours sur ce chemin. Il est bon d'y être préparé.

La vie est un chemin jonché d'épreuves et d'obstacle mais sa splendeur est incomparable et la tâche qui vous incombe est de la préserver. C'est votre responsabilité. Et ce chemin ne prendra son sens que dans le partage et la solidarité. 

Et vous, chers liens tissés d'un rien, qu'avez-vous appris de l'autre?

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Commentaires
N
C'est vrai, la non-attente peut tuer l'émerveillement de la rencontre. Il est bon de se tromper, d'échafauder des plans destinés à tomber à l'eau pour voir surgir des imprévus! Quel goût aurait la vie si il n'y avait plus d'attente, disons-le plus de DESIR! Le désir est une force fabuleuse qui nous pousse vers l'autre, désir de connaitre, désir de comprendre, désir d'aimer. Le désir est ce qui nous fait oublier le risque de souffrir inextricablement lié à la rencontre et même à l'amour!<br /> <br /> La non-attente n'est pas vraiment humaine mais plutôt divine car elle sous-entend que tout ce qui vient et parfait.Donc nulle attente de mieux.<br /> <br /> La non-attente selon mon expérience veut aussi dire être parfaitement présent à l'autre, être dans une bulle d'éternité, quand le temps se suspend et qu'on vit la communion avec l'autre. Il n'y a plus d'attente à cet instant rare car l'instant est tout simplement...parfait.<br /> <br /> La non-attente peut être une grâce mais elle ne peut être provoquée par l'attitude...
A
Tout à fait juste, l'attente est le contraire de l'accueil. Mais la non- attente aussi. Dire à l'autre " je n'attends rien " c'est se protéger de toute prise de risque et annuler tout élan chez l'autre, tout désir de rencontre. Car comme vous le dites très justement, le lien existe par la rencontre de l'un avec l'autre, pas par l'un ou par l'autre. Mais pour que rencontre il y ait, il faut parfois quitter ses vieilles pelures pour se découvrir tout étonné avec une peu neuve qui prend bien le soleil.
N
J'aime beaucoup aussi ce commentaire qui "sent" le vécu...<br /> Le fait d'aller au bout de soi est selon moi ce qui relève du libre-arbitre. Le choix que nous avons face à la rencontre, face à l'autre c'est:<br /> - rester sur ses gardes et ne rien donner (ou seulement des miettes pour faire espérer à l'autre qu'on va finir par s'ouvrir)<br /> - soit de faire le "vide" en soi, c'est à dire être dans l'accueil plus que dans l'attente. <br /> L'attente étrangement ne nous rend pas plus réceptif. Au contraire,l'attente présuppose qu'on connaisse à l'avance l'objet de notre attente. <br /> Alors que l'accueil est plus ouvert et laisse place à l'imprévu. On n'anticipe pas. On laisse l'autre être ce qu'il peut, tout comme soi.<br /> <br /> Lorsque "Anonyme" dit que l'amour ne suffit pas, je me permet d'ajouter que peu de gens savent ce qu'est l'amour; disons que ce terme est un peu la fosse commune de tout ce qu'on croit connaitre de "l'attachement". <br /> <br /> Et en effet, l'amour suppose un lien mais si l'on observe bien on se rend compte que "s'attacher à quelqu'un" est à la fois une évidence mais aussi une illusion.<br /> Le lien est établi à partir de la rencontre et il existe donc en dehors de toute volonté.Cependant,l'autre restera toujours "autre", il ne nous appartient pas et peut même disparaître. Nous sommes donc libre de donner à ce lien le sens que l'on souhaite. On peut choisir un lien d'échange réciproque ou un lien égotique c'est à dire uniquement basé sur ses propres manques ce qui revient à dire que même si il y a eu rencontre nous n'en avons pas eu réellement conscience.<br /> <br /> L'amour est donc un lien libre ce qui peut sembler paradoxal et un lien "conscient" c'est à dire lorsqu'on accepte l'altérité et la différence de l'autre malgré les risques que cela peut encourir pour soi (nos certitudes, nos croyances, nos limites).<br /> <br /> On n'est plus dans la fusion enfantine ou l'autre n'est qu'un prolongement de soi.<br /> On accepte de se remettre en question, de déplaire, de ne pas être en accord, de perdre ses repères, de se mettre à nu. On accepte donc de souffrir. <br /> <br /> Cela demande beaucoup d'humilité d'accueillir l'autre car cela suppose qu'on est prêt à redéfinir sans cesse notre vision de monde!<br /> <br /> Le monde tel que nous le percevons n'est pas le monde dans son intégralité. Nous n'avons pas accès à la totalité de l'univers simplement en le voulant ou en réfléchissant.<br /> <br /> Cette "totalité" est pourtant contenue dans chacune de nos fibres, dans l'adn,nous sommes les particules d'un ensemble qui contient les données même de cet ensemble. <br /> <br /> Mais notre conscience ne peut y avoir accès. Sauf lorsqu'elle laisse place au vide à une conscience absolue qui elle, peut concevoir et embrasser tout ce qui est sans effort.<br /> <br /> C'est ce qu'on appelle la transcendance et c'est ce qui fait que même face à l'inconnu, nous pouvons retrouver une certaine familiarité. Nous pouvons aimer, accueillir même ce qui semble très différent de nous.<br /> <br /> En cela chaque lien révèle un peu du grand mystère et en cela chaque lien nous enrichit. A condition de vouloir le vivre dans l'accueil c'est à dire dans le don de soi, dans l'attention.<br /> <br /> Merci à vous et désolé pour cette interminable réponse! :)
C
j'ai beaucoup aimé dans le précédent commentaire "fuir ou ignorer ceux qui ne donnent que des miettes d'eux-mêmes".<br /> et c'est tellement vrai !<br /> les gens, en donnant, ont peur de se perdre.
A
Qu'il ne suffit pas d'aimer pour que l'autre s'offre en partage. Qu'effetivement une pseudo-littétature psychologico-religieuse veut nous faire croire que l'écoute et le respect inconditionnels permettent l'ouverture, érigent la solidité du lien.Qu'il vaut mieux fuir ou ignorer ceux qui ne donnent que des miettes d'eux-mêmes, distillées au compte-goutte,juste pour vous tenir en équilibre dans l'attente d'une plénitude qui ne se produit jamais, alors qu'eux n'ont que la crainte de perdre non pas vous, mais une image d'eux-mêmes qu'ils justifient à grands coups de "je ne me sens pas de le faire..." Que tout lien comporte des risques, que la multiplicité de leurs formes est infinie. Ce n'est pas la forme du lien qui le définit, mais le risque d'aller au bout de soi-même que l'on n'est prêt à prendre.
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